Posté devant une longue et imposantes rue commerciale, je m'étirais et scrutais un peu les alentours. Il n'était pas rare que je vienne dans ce genre d'endroits un peu chics et bien côtés en fin d'après midi afin de respirer un autre air que celui de mon petit logement confiné. J'ai beau être issu d'une famille riche, maintenant que j'ai quitté le manoir familial pour mener ma propre vie ma fierté ainsi que le respect que j'ai pour mes tantes m'interdit de revenir en rampant pour réclamer de l'argent. Alors je vis dans un petit studio au coeur de la Sicile avec les faibles revenus que je gagne à travailler durement. Mais c'est comme ça la vie des mafieux. Il ne faut pas croire que Mafia rime automatiquement avec luxe et bagues en or à chaque doigts. Non, on commence tous en bas de l'échelon. Enfin presque, et les rares qui arrivent au sommet rapidement avaient un chemin tout tracé. Ce qui n'était pas mon cas et pour cette raison je restais tranquillement sous les ordres qu'on me donnait. Hors de question de me faire remarquer dans le mauvais sens si je voulais un jour être suffisamment important pour choisir moi-même de rejoindre la Varia.

Peu importe, aujourd'hui me voici dans un des quartiers les plus riches de la cité à proximité de mon studio. Il m'arrive parfois de rêver d'avoir le compte en banque à Rothschild pour ne pas voir l'argent fondre comme neige au soleil et acheter tout et n'importe que sur un coup de tête. Et puis après je réalise que je n'en ai rien à faire et que les gens qui le font sont à la fois idiots et amusants. Alors je m'engage dans la grande allée principale juste pour observer et détailler tous les passants et deviner à quoi il pense où le genre de comportement qu'ils ont. Ces moments-là sont sûrement les seuls où je fais attention à ce qui m'entoure.

Afin de passer un peu plus inaperçu et de ne pas avoir l'air d'un touriste égaré, je rentre dans une petite impasse et libère mon animal de ma boite, lui passant un collier autour cou et lui ordonnant de ne pas activer ses flammes. Cette situation pourrait effectivement me poser problème, vous imaginez si un passant voyait ça ? « Bonjour monsieur. Votre chien est en train de prendre feu.. - Non non, c'est normal ne vous inquiétez pas. » Et puis on est jamais trop prudent, des mafieux pourraient traîner dans le coin et je ne suis franchement pas du genre à m'attirer les ennuis. Je me mets donc en marche entre les passants un peu pressés et affolés par le stress ambiant, regardant de temps à autre les vitrines des bijouteries ou des magasins de luxe où les futurs clients s’agglutinent. Mes yeux se posèrent sur un homme -ou une femme- extravagant avec une crête et des habits pour le moins voyant et colorés. C'est tellement rare de voir les gens assumer leur façon d'être, même quand leurs goûts sont.. étranges ?

Trop absorbé par cet individu hors du commun de la foule actuelle, je ne parvins pas à rattraper la laisse de mon chien lorsque quelqu'un percuta mon épaule. Attiré par trop d'odeurs et de sons, l'animal s'échappe en courant entre les passants, babines et oreilles au vent. Il semble avoir repéré quelqu'un ou quelque chose et s'élance à sa suite. Paniqué, je commence à partir à sa suite en bousculant les gens et en me faisant bousculer. Je n'ose pas hurler pour le rappeler, et puis de toute façon ça ne servirait à rien à cause de tout le bruit qu'il y'a déjà. Merde.. Il fonce droit sur l'homme extravagant que j'ai observé juste avant ! Je cours de l'autre côté de la rue et je le vois sauter sur ce fameux individu, de très faibles flammes apparaissant dans ses oreilles. J'attrape sa laisse et je le plaque au sol, priant de tout coeur pour que l'homme n'ait pas eu le temps de voir ces flammes.

« Excusez-moi, je ne sais pas ce qui lui a pris. Il ne le fait pas d'habitude, soulignais-je en me relevant et en tenant fermement l'animal près de moi avec la laisse. »

C'est bien rare que quelqu'un puisse entendre le son de ma voix, mais là c'était la moindre des choses que de m'excuser après que mon chien se soit comporté ainsi. J'espère que cet homme, maintenant je sais que s'en est un après l'avoir vu de près, se montrera compréhensif. Quelle maladresse...